20/09/2010
Entretien de MAM à La Croix
La Croix : Certains professionnels du droit disent agir aux frontières de la légalité, faute de moyens suffisants pour mener leur mission. N’est-ce pas paradoxal pour des fonctionnaires censés faire respecter la loi ?
Michèle Alliot-Marie : Ne mélangeons pas tout, expertises, frais de justice, postes de greffiers, durée des audiences. Sur ce dernier point notamment, on a parlé récemment de la circulaire de Mme Lebranchu. Je ne suis pas certaine que ce texte ait jamais été appliqué, même sous Mme Lebranchu !
Il faut être pragmatique. Si, pour des raisons pratiques, les règles édictées par cette circulaire ne peuvent être respectées, je suis ouverte à l’idée qu’on réfléchisse à un nouveau texte. Je suis prête à étudier les propositions des syndicats, des greffiers, des magistrats et de tous ceux qui font fonctionner la justice au quotidien.
Les magistrats pointent aussi le fait que certaines juridictions ne soient plus en mesure, en cours d’année, de payer les expertises judiciaires ou encore les jurés. Que comptez-vous faire ?
J’ai découvert cette situation à mon arrivée à la chancellerie. Je me suis alors attelée à débloquer les fonds nécessaires. Plus de 50 millions d’euros ont été alloués en début d’année aux juridictions les plus en difficulté. 30 millions supplémentaires devraient prochainement leur parvenir. Nous continuerons ces efforts financiers.
Les magistrats rappellent régulièrement que le budget de la justice française figure au 35e rang européen. Consacrons-nous assez à ce secteur ?
Pendant des décennies, les budgets alloués à la justice étaient insuffisants au regard de la mission. Depuis 2002, ils n’ont cessé d’augmenter. L’an dernier, ce budget a crû de 3,4%. C’est là une hausse significative dans le contexte actuel de réduction des dépenses publiques.
Par ailleurs, notre ministère n’est pas soumis – et c’est une exception – à la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux. Les effectifs ont même augmenté : depuis 2007, le personnel pénitentiaire est passé de 31 000 à 34 000. Par ailleurs, 400 postes de magistrats ont été créés, ainsi que 400 postes de greffiers.
Ajoutons que la modernisation informatique des juridictions devrait, à terme, dégager un gain de temps considérable pour les fonctionnaires et leur permettre de se recentrer sur le cœur de leur mission.
Votre ministère continuera-t-il à être épargné lors du prochain exercice budgétaire ?
Nous le verrons dans quelques semaines, quand le projet de budget pour 2011 sera présenté, mais c’est ce que j’ai défendu lors des négociations budgétaires. J’ai bon espoir que les besoins financiers conséquents des juridictions soient pris en compte.
Aux dires des magistrats, la réforme de la carte judiciaire se révélerait difficile à mettre en place dans certaines juridictions…
La mise en place définitive de la réforme ne devant être effective que fin 2011, il est pour l’heure impossible d’en dresser un bilan. Dans les quelques juridictions – une dizaine – où des problèmes ont été signalés, j’ai demandé à Jean-Marie Bockel de se rendre sur place pour recenser les difficultés rencontrées afin que nous y apportions les réponses les plus adéquates.
Brice Hortefeux préconise l’élection des juges de l’application des peines, de même que l’introduction de jurés populaires en correctionnelle. Qu’en pensez-vous ?
Brice Hortefeux lance une question, c’est son droit. Il a ses idées, j’ai les miennes. Les jurés populaires sont une piste de réflexion lancée par le président de la République.
Pour ce qui est de l’application des peines, j’ai réfléchi à des pistes pour améliorer le dispositif qui conduit à prononcer la libération conditionnelle. Je les présenterai très rapidement.
11:06 Publié dans Actualités | Lien permanent | Commentaires (0)
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